Assemblée nationale Matata : les non-dits d’une interpellation

Publié le par cité africaine

Selon des sources bien informées, il avait été question qu’il soit hué et conspué pendant son adresse devant les élus du peuple mercredi dernier. Mais la forte mobilisation des sympathisants des partis membres du Gouvernement devant le parvis du palais du peuple, a peut-être dissuadé les instigateurs de cette sombre entreprise à plus de prudence. Mais il n’empêche que mercredi 20 avril, le Premier ministre Matata Ponyo est resté pratiquement toute la journée vissé sur sa chaise, à écouter, tout le mal que certains députés pensent de sa gestion et de celle de certains de ses ministres, après avoir rendu sa copie aux élus du peuples, au terme d’une question orale avec débat, lui posée par le député Crispin Bindule, est ampilé UNC .

Une question orale en forme d’encyclopédie, puisqu’on demandait au chef du Gouvernement ni plus ou moins que de justifier la gestion de son Gouvernement durant la période 2012 à 2016. Une question tellement générique qu’elle sentait le coup fourré à plein nez, avec certainement en filigrane, une intention manifeste de prendre en défaut le destinataire. Apparemment, à lire les médias qui ont relayé la séance de mercredi, l’intéressé a réussi à se tirer d’affaire et à garder son flegme malgré quelques dérapages verbaux de certains élus du peuple, qui ne semblent plus se contrôler dès qu’ils sont en face des caméras.

Mais au-delà de l’aspect vague de l’intitulé de la question orale et du débat qui s’en est suivi, il reste avec le recul, le problème de la pertinence et de l’opportunité de cette question elle-même. Selon des députés de l’opposition croisés mercredi dans les couloirs du palais du peuple, le débat de mercredi ne concernait que de loin les préoccupations actuelles de l’opposition, plus concentrée désormais sur le calendrier électoral et la fin de la législature. « C’est un combat qui ne nousconcerne pas ; c’est une bataille interne à la majorité », a notamment déclaré un député du groupe Udps et Alliés, selon qui, l’auteur de la question orale au Premier ministre, n’aurait servi que de bras armé.

L’histoire de la question orale contre le Premier ministre Matata remonte à décembre 2015. Selon des sources dignes de foi, le député Mindule avait soumis au Bureau de l’Assemblée une question orale portant uniquement sur la situation sécuritaire dans la province du Nord Kivu. C’est au Bureau de la Chambre basse, indique la même source, qu’on lui aurait suggéré de modifier sa question orale en la transformant en un questionnement sur la gestion globale du Gouvernement. Des informations non vérifiées affirment que c’est un membre du Cabinet du Président de l’Assemblée nationale qui aurait même aidé à la rédaction du texte.

Querelles de leadership

Mercredi dans l’enceinte du Palais du peuple, des observateurs ne cachaient d’ailleurs pas leur étonnement de voir que le Président de la Chambre basse du Parlement, par ailleurs Chef de la majorité au pouvoir, n’avait organisé aucune réunion préliminaire à la comparution du Chef de son Gouvernement devant la plénière comme cela est de coutume en de telles circonstances. Des témoignages recueillis sur place indiquaient que des tentatives en ce sens menées par des députés et alliés pour une telle réunion, n’avaient eu aucun écho auprès du Bureau de l’Assemblée nationale, de sorte que les députés de la majorité n’avaient reçu aucun consigne sur leur comportement durant et après l’oral du Premier ministre.

Il est de notoriété publique qu’une sorte de guéguerre oppose depuis un certain temps les deux personnalités les plus en vue de la majorité présidentielle. L’opinion se souvient encore de ces piques adressées l’année dernière au Premier ministre par l’entourage du Président de l’Assemblée, accusant le Chef du Gouvernement de faire sa propre promotion politique dans les médias, et d’éclipser ainsi les mérites du Chef de l’Etat, dont il n’était pourtant que le fidèle exécutant. Cette guerre feutrée semble gagner en ampleur au fil des mois, depuis que le pays s’avance vers une fin de législature à multiples inconnues.

Dans le système politique de la MP, le Chef de la majorité au pouvoir, c’est le Secrétaire Général qui régente toute les parties prenantes au pouvoir. Dans le système communiste par exemple, c’est le Secrétaire Général qui a le plus de chance de succéder au Chef de l’Etat en exercice, pour autant qu’il prenne soin de neutraliser au bon moment ses adversaires éventuels. Dans des pays d’ancienne démocratie, c’est souvent le Secrétaire Général du parti qui est investi candidat à l’élection présidentielle, au terme d’un congrès du parti. En Rdc, au cas où l’actuel Chef de l’Etat ne se représentait pas, c’est en principe le Secrétaire Général de la MP en titre qui pourrait hériter de sa succession, d’où un intérêt évident à maximiser ses chances en vue d’une telle éventualité, en mettant dans la mesure du possible, hors de portée de nuire, tous les concurrents éventuels à un dauphinat. On pourrait dire que c’est de bonne guerre, et l’actuel SG de la majorité n’est pas le premier à réfléchir ni à agir de la sorte.

Mais dans le cas spécifique de la majorité au pouvoir en Rdc, le Secrétaire Général de la MP, souffre d’un handicap sérieux : il est le produit d’homme, le Président de la République, Autorité morale de la majorité qui l’a nommé, et non le fruit d’une élection par un Congrès. Il ne tient donc sa légitimité que de la volonté d’un homme, tout comme tous ceux qu’il pourrait aujourd’hui comme des adversaires potentiels pour sa marche vers les sommets.

CITAF

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