Test de popularité réussi pour «Tshikas»

Après deux ans d'absence pour raison de soins médicaux en Belgique, c’est donc mercredi que l'opposant historique congolais, Étienne Tshisekedi a regagné Kinshasa où l'ont accueilli avec ferveur des dizaines de milliers de ses partisans et sympathisants.

La foule immense l’attendait impatiemment à l’aéroport international de N’Djili dès les premières heures de la journée du mercredi 27 juillet. Des leaders de l’opposition affirment que des centaines de milliers de Congolais ont fait le déplacement de l’aéroport de N’Djili et environs pour accueillir celui qu’ils considèrent comme un espoir dans le déblocage de l’impasse politique actuelle au pays. A son arrivée, le Sphinx de Limete a été accueilli par quelques personnalités du Rassemblement des Forces sociales et politiques acquises au changement. Entre autres, Franck Diongo du MLP, Martin Fayulu de l’Ecidé, Joseph Olenghankoy des Fonus, Félix Tshisekedi de l’UDPS, Delly Sessanga de l’ENVOL, Jean-Pierre Lisanga Bonganga du Front du Peuple. …

Selon certains opposants, l’arrivée du leader du Rassemblement de l’opposition est une bombe qui va secouer la terre car, c’est le début de l’alternance. Pour d’autres, le retour de ‘’Tshikas’’ va remettre les choses en ordre, dans la perspective du dialogue, seule et unique voie pour gérer en toute quiétude l’alternance politique voulue à la fin du second et dernier mandat de l’actuel chef de l’Etat, grâce à la tenue du dialogue politique national inclusif.

Des réactions euphoriques

Dans l’élan de transport et d’excitation liés au retour de patron de l’UDPS et leader historique de l’opposition congolaise, c’est comme si l’opposition congolaise, orpheline, retrouvait son chef charismatique. Dans cette ambiance, le président du Front populaire, Jean Pierre Lisanga Bonganga, a clamé devant des journalistes : « le ciel va tomber le 31 juillet». Coordonnateur du Front du Peuple et des Alliés de Tshisekedi, Jean-Pierre Lisanga Bonganga a affirmé que Tshisekedi allait bouger Kinshasa. « Je suis un homme heureux, et aujourd’hui je suis un prophète parce que quand j’avais dit que Tshisekedi allait rentrer au pays, personne ne m’avait cru. Je vous dis que le 31 juillet 2016, le ciel va tomber, et Tshisekedi va parler. Il va donner un message d’espoir et de vérité », a-t-il déclaré. Pour Delly Sessanga, le retour de Tshisekedi est le début des grandes actions pour les forces sociales et politiques acquises au changement. «L’arrivée du président Tshisekedi est le début des grandes actions d’envergures qui vont être lancées sur l’étendue du territoire national pour dire que dans une démocratie, le pouvoir appartient au peuple, et le peuple l’exerce par voie de suffrages. Nous n’accepterons pas que dans ce pays, qui que ce soit confisque le pouvoir que nous nous sommes donné. Nous avons deux messages importants : le respect de la constitution, le respect du nombre des mandats du président de la République. Nous disons ‘’oui au dialogue’’, mais, dans le cadre de la résolution 2277, en vue de trouver la solution au problème du processus électoral, pas pour faire des combines et des compromis sur le dos du peuple congolais. Aujourd’hui, il a été démontré que le Rassemblement, c’est l’ensemble des élites, c’est l’ensemble de l’opposition et avec le peuple, nous vaincrons tous les périls sur le chemin où se négocie la démocratie », a dit le président de l’ENVOL. En ce qui concerne le meeting du 31 juillet prochain, Delly Sessanga a, au nom de l’Alternance pour la République, lancé un appel à la mobilisation générale pour la réussite de cette grande manifestation de l’opposition. «Le 31 juillet, nous en appelons à la très grande mobilisation de l’ensemble du peuple congolais pour ce meeting de lancement de l’action de la consolidation de la démocratie, de la sauvegarde de la constitution, de l’exigence du respect, par tous, de la constitution. Ça va être l’annonce de ce rassemblement et de cette unité du peuple congolais au-delà de clivages. Et ce qui a été fait à Genval est aujourd’hui au Congo une réalité. On nous a souvent accusés d’être au service de l’étranger par ceux qui voulaient crucifier Genval, aujourd’hui, nous avons démontré, effectivement que le peuple congolais est derrière le Rassemblement et que le peuple congolais n’exige qu’une seule chose : le respect de la Constitution et la tenue de l’élection présidentielle pour se choisir un nouveau président de la République », a-t-il assuré. « C’est un grand événement. Tshisekedi est celui que nous considérons comme le père de la démocratie et c’est avec lui qu’on a compris la nécessité de diriger en respectant les textes de la République, en disant notamment que l’Etat de droit existera si, et seulement si, nous respectons les textes. Voilà pourquoi, le retour de Tshisekedi est un événement. Un événement de la démocratie dans notre pays, un événement pour l’Etat de droit et un événement pour l’alternance dans cette République qui est la nôtre », a déclaré le Secrétaire général de l’UDA Originelle, parti politique de l’opposition, membre de la Dynamique pour l’Unité d’actions, Martin Munkokole. Réagissant par rapport au dialogue, il s’est exprimé en ces termes : « Nous, nous sommes les respectueux des textes et nous vous avons dit que le dialogue version Kabila n’avait jamais son sens parce que c’était la violation parfaite de la Constitution. Nous soutenons le dialogue conformément à la résolution 2277 pour que le processus électoral puisse aboutir dans un climat apaisé et à l’instauration de la vraie démocratie dans notre pays. La grande manifestation de l’opposition, c’est le 31 juillet 2016, voilà pourquoi nous appelons toute la population à venir en grand nombre pour soutenir les actions de l’opposition congolaise».

Le film de l’arrivée

Le Jet privé transportant Etienne Tshisekedi était annoncé comme devant atterrir à 12 heures locales, étant parti de Bruxelles tôt le matin du mercredi, à 5h TU. Mais il n’atterrira finalement qu’à 14 h 5’. Une rumeur va alors courir à l’aéroport indiquant que la RVA n’avait pas encore autorisé à l’aéronef de Tshitshi d’atterrir et que le vieil opposant se trouvait bloqué à Brazzaville depuis 12H. Des supputations ont commencé à parler d’une manœuvre visant à retarder l’arrivée de Tshisekedi jusqu’en début de soirée pour démobiliser les foules de partisans et sympathisant qui l’attendaient pour l’acclamer. Dès lors, agitation parmi les opposants présents à l’aéroport. Une conférence de presse est improvisée séance tenante pour dénoncer ce ‘’complot’’ promettant que nul ne pourrait plus répondre de rien si ces manœuvres venaient à être portées aux oreilles des foules qui s’impatientaient. Voyant que la colère gagnait du terrain, le commandant de l’aéroport, Georges Tabora, a fait de son mieux pour rassurer que le jet allait atterrir. «Je vous rassure que le jet du président Tshisekedi va atterrir. Je suis en contact avec Brazzaville ou est immobilisé le jet qui conduit le président Tshisekedi. Calmez-vous, dans les minutes qui suivent le président Tshisekedi sera parmi nous». Des propos qui ont calmé les leaders politiques de l’opposition. Vingt minutes après, à 14h, effectivement le Jet atterrissait à N’Djili. Seulement, il faudra encore attendre 45 longues minutes, alors que son fils Félix, ayant précédé un jour plus tôt son père à Kinshasa, entrait et sortait de l’avion pour préparer le débarquement. Enfin, Tshisekedi sort, accompagné de son épouse Marthe, et de quelques proches. Vêtu d’un costume sombre, coiffé de sa légendaire casquette ‘’ munyere’’ le Sphinx va alors saluer le comité d’accueil composé des ténors de l’opposition, sous le regard discret du commissaire provincial de Kinshasa, le général Kanyama.

Commencera alors la lente procession de N’Djili à Limete, sous les ovations et la clameur d’une foule en délire. Sur le parcours, des dizaines de milliers de Kinoises et Kinois étaient massés pour acclamer Ya Tshitshi. Le boulevard Lumumba, noir de monde a vu la circulation bloquée en sens unique sur la voie menant vers Limete. Des banderoles tapissaient l’itinéraire où les partis politiques de l’opposition et associations assimilées ou proche saluaient le retour d’Etienne Tshisekedi et l’assuraient de leur soutien. Tout au long du trajet, l’homme, à bord d’un véhicule à toit ouvrant, avec son épouse Marthe à ses côtés, se tenait par moments debout pour répondre aux ovations de ses partisans et autres badauds, alors que l’escorte menée par des jeeps de la police nationale fendait lentement la foule compacte. Police cette fois exemplaire et disciplinée qui a assuré l’ordre et la protection avec professionnalisme. Cinq bonnes heures de procession, sur une distance de quelque 15 kilomètres seulement, de l’aéroport à Limete résidentiel. Un carnaval de piétons, de voitures et de motos, les fameux ‘’wewa ‘’ qui désormais font partie du décor de nos villes. C’est aux environs de 20 heures que le cortège atteindra la 10ème Rue à Limete, où est installé le siège de l’UDPS. Un podium y avait préparé pour le cas où «Ya Tshitshi» aurait voulu s’exprimer face à l’immense foule qui l’attendait. «Le président doit se reposer après ce long voyage. Je vous invite nombreux à venir le dimanche 31 juillet à la place Triomphale pour écouter le discours du Mandela Congolais, le président Etienne Tshisekedi», a lâché Bruno Mavungu, secrétaire général de l’UDPS aux combattants.

Les à-côtés de l’événement

Plusieurs leaders du G7 avaient regagné leur domicile bien avant l’atterrissage du Jet de Tshikas. Pour cause: Leurs noms ne figuraient pas sur la liste qu’avait confectionnée le Secrétaire Général de l’UDPS-Bruno Mavungu pour avoir accès au salon VIP de l’aéroport international de N’Djili où les consignes de sécurité étaient strictes. Ainsi de Christopher Lutundula, Olivier Kamitatu, José Endundo. Il faut affirmer que les dispositifs sécuritaires étaient au point ; la Police nationale a été à la hauteur de sa tâche. Tôt le matin, vers le 7 heures , bien avant l’atterrissage du Jet de Tshisekedi, le commissaire général de la PNC, le général Charles Bisengima avait donné des instructions aux policiers commis à la sécurité à l’aéroport de bien encadrer la foule et de rester calmes et disciplinés, malgré les provocations qu’il ne manquerait pas d’y avoir. Ce qui fut fait, malgré quelques incidents mineurs signalés à Masina mais très vite calmés par la Police. Avant de descendre de son Jet, Tshisekedi avait eu un échange de trois minutes avec le commissaire provincial de la Police-le général Célestin Kanyama, dans le Jet. Des informations non vérifiées ont couru selon quoi Kanyama aurait suggéré au vieil opposant, vu l’immensité de la foule, d’appliquer le formule ‘’Marie Misamu’’, consistant à extirper le VIP, et à filer avec à toute vitesse, ni vu ni connu ! Ce à quoi Tshisekedi aurait dit ‘’niet’’, demandant plutôt au général d’instruire ses hommes afin de faire montre de savoir-faire afin d’éviter tout dérapage et toute bavure. Kanyama aurait agi selon le vœu exprimé par le Sphinx, assure-t-on.

Ya MAKIESE