Le viseur: Le bon combat !

Publié le par La Cité Africaine

C’est véritablement un poids lourd de la politique congolaise de ces trois dernières décennies qui vient de tirer sa révérence. Charles Mwando Nsimba s’est éteint le 12 décembre à l’âge de 80 ans, dans un hôpital de Bruxelles où il avait été admis il y a quelque deux mois pour y suivre les soins que nécessitait son état. La nouvelle a été accueillie avec consternation à Kinshasa, d’autant que très peu le savaient malade et retenu en Belgique pour des ennuis de santé. Depuis la tenue du conclave de Genval en effet, la capitale belge est devenue un lieu assez fréquenté par certains opposants, parfois pour un séjour assez prolongé.

Depuis l’annonce de sa mort, les réseaux sociaux sont envahis par plusieurs messages qui rendent hommage à l’illustre disparu pour son combat politique. L’on salue ‘’ un véritable homme d’État, intègre, dévoué à son combat en faveur de la démocratie, et dont la disparition constitue une grave perte pour le Katanga et la RDC’’. D’autres mettent en relief ‘’la contribution patriotique et démocratique ainsi que l’efficacité et la droiture de ce « BAOBAB », « BABU WA MANO » autrement dit « Vieux sage ». Avec émotion, certains messages de condoléances évoquent ‘’un Martyr de l’alternance politique, qui a guidé les troupes jusqu’au tournant historique et dont l’âme reposera en paix aux cotés des vaillants combattants fauchés en Janvier 2015 et Septembre 2016, en jurant sur sa mémoire que ‘’ la lutta continua, victoria certa’’ ».

Charles Mwando Nsimba aura été une figure marquante de l’histoire politique de la RDC de ces dernières années. Baron du régime Mobutu durant la Deuxième République, il y fut de longues années gouverneur du grand Kivu, et occupa plusieurs maroquins ministériels. Il était le roi de Moba, son patelin, son intangible fief électoral, où il était assuré d’être élu et réélu autant qu’il l’aurait voulu. Sous le régime Kabila, il fut député national, et notamment ministre de la Défense, Premier vice-président de l’Assemblée nationale. Nommé informateur à l’issue des législatives de 2011, il permit de dégager la majorité parlementaire qui allait ouvrir la voie à la nomination du Premier ministre Matata et la formation du gouvernement. Lorsque commença à se poser la problématique du glissement du mandat présidentiel de Joseph Kabila, après le terme de son second et dernier quinquennat puisque empêché par la constitution de se représenter, Mwando Nsimba fut au nombre des bonzes de la Majorité présidentielle qui prirent le courage de déconseiller toute tentative de putsch constitutionnel. Une attitude qui conduisit au divorce d’avec la MP et amena le vieil homme, avec six autres compagnons, à créer le G7, une plateforme qui se positionna dès lors nettement dans l’opposition. Le fossé s’amplifia irrémédiablement avec l’alignement de ce regroupement d’anciens cadres de la Majorité derrière la candidature de l’ex- gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi, à la prochaine présidentielle. Dès lors, traitre aux yeux de la kabilie, mais patriote et défenseur de la démocratie pour les autres, Charles Mwando Nsimba va, à la tête du G7, mener un combat sans concession pour le respect de la constitution, en affichant des positions radicales et intransigeantes sur ce front. Il était, jusqu’à sa mort, membre du Conseil des sages du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement piloté par Etienne Tshisekedi. Plusieurs tweets postés sur la toile évoquent d’ailleurs les tourments de cet opposant ‘’malmené et humilié à maintes reprises à cause de son combat, empêché d’embarquer et parfois d’atterrir dans son fief, et qui vient de tirer sa révérence loin des siens’’.

Mwando Nsimba nous quitte au moment où vient d’aboutir sa quête pour la convocation d’un vrai dialogue, alors justement que les Congolaises et Congolais sont tout yeux et tout oreilles pour ce qui se passe au Centre Interdiocésain de l’Eglise catholique, où la CENCO , après avoir réussi le tour de force de lancer le Deuxième dialogue mettant enfin ensemble les vrais protagonistes du jeu politique en RDC , va tenter de les amener à signer l’accord global et inclusif pour mettre fin à la crise congolaise.

Ainsi donc, celui que des gens de sa contrée appelaient ‘’Lion du Katanga’’ a perdu son dernier combat, celui qu’il livrait ces dernières semaines contre la maladie. En tous les cas, il donne à tous une leçon : sous le firmament, à part l’éternité, tout passe ; les biens et les grandeurs, les charges et les rangs, tout passe ! Mais de l’au-delà, sa joie serait totale et complète si sa foi en l’alternance politique venait à se trouver un écho au travers des conclusions attendues du dialogue du Centre Interdiocésain. Mwando Nsimba a combattu le bon combat pour la cause de la démocratie congolaise. Puisse-t-il en être honoré par tous les bords. Paix à son âme !

Mantha L.

Publié dans citaf

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