Viseur: Candidat unique !
Candidat unique, ou candidat commun, selon la nuance que l’on veuille y apporter ! Le concept est plus que jamais à l’ordre du jour des débats et cogitations dans les états-majors politiques en RDC, alors que l’horizon des élections paraît s’éclaircir. La notion semblait s’imposer particulièrement pour le camp de l’opposition où plusieurs candidatures se sont d’ores et déjà déclarées, prises en charge par différentes plateformes. L’on peut déjà noter : Moïse Katumbi Chapwe pour ‘’Ensemble pour le changement’’, Félix Tshisekedi Tshilombo pour l’UDPS et alliés, Vital Kamerhe avec l’UNC et Alliés, Freddy Matungulu et son Congo na biso et Alliés, Adolphe Muzito, soutenu par la base du PALU et Alliés, Martin Fayulu de la Dynamique de l’Opposition et Alliés. A cette liste, vient de s’ajouter le nom de Jean Pierre Bemba lequel a été investi candidat du MLC et Alliés à la présidentielle de décembre prochain, au terme du congrès tenu le week end dernier par son parti le MLC. Avec tant de candidats, les observateurs sont d’avis que l’opposition verrait ses voix totalement éparpillées lors de la présidentielle, et donc ruinerait ses chances de l’emporter et d’imposer l’alternance au pouvoir. D’où l’exigence d’un rassemblement destiné à jauger et juger des ambitions et des capacités réelles des différents postulants, de manière à parvenir à un modus vivendi qui permettrait de booster un candidat commun derrière lequel toutes les forces du changement se rangeraient. Depuis quelques jours, l’on entend d’ailleurs des appels dans l’opposition invitant à la convocation urgente d’une rencontre des forces de l’opposition pour débattre de ces questions et aboutir à une position commune dans la perspective des élections qui pointent à l’horizon.
Mais ne voilà-t-il pas que depuis peu, la Majorité présidentielle qui semblait être à l’abri de ce type de préoccupation, vient elle aussi de s’inscrire dans la logique d’une candidature commune. C’est qu’entretemps, le camp Kabila a résolu de ratisser encore plus large par la création du Front commun pour le Congo qui englobe en son sein, outre la MP, un bon nombre de partis et regroupements politiques, des associations de la Société civile ainsi que des personnalités en vue venant de tous les horizons. Mais pour éviter les mauvaises surprises de celui qui, à force de trop embrasser, finit par mal étreindre, comme le dit l’adage, les stratèges kabilistes ont mis en œuvre un mécanisme de fidélisation des sociétaires du FCC. Ces derniers ont été contraints de signer un acte d’engagement officiel afin de confirmer leur soutien au candidat qui sera désigné pour porter les couleurs du camp Kabila à la prochaine présidentielle. Ici, la procédure a suscité questionnements. D’abord en ce qui concerne les membres du gouvernement actuel. D’aucuns dénoncent cette pression qui contraint les ministres d’adhérer au FCC par un devoir de solidarité gouvernementale, lequel a été traduit en des termes comminatoires attribués à un illustre ministre français : ‘’Un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne’’. Ce qui, dans le propos qui nous occupe, pourrait devoir signifier : ou vous signez la charte du FCC ou vous devrez quitter le gouvernement ! Il n’en aura pas fallu davantage pour assujettir des leaders particulièrement attachés à la mangeoire. D’autres se chagrinent encore que les ministres représentant l’opposition au sein de ce cabinet, suivant l’accord de la Saint Sylvestre, en soient venus à faire allégeance à la Majorité. Question : si tout le monde revêt désormais la même couleur, peut-on encore parler d’un gouvernement d’union nationale dirigé par un représentant de l’Opposition et censé impliquer Majorité, Opposition, Société civile? Que devient dans ce cas l’accord du 31 décembre 2016 qui trouve son fondement dans une gestion de l’Etat basée sur le principe de l’équilibre institutionnel et de la cogestion ? Autre sujet de préoccupation, le fait pour les sociétaires du FCC d’avoir souscrit à une démarche soutenant un candidat qui reste à désigner, c’est-à-dire quel qu’il soit, sans savoir leur part de responsabilité dans la désignation dudit candidat. N’est-ce pas ce qui s’appelle : acheter un chat dans un sac ?
Qu’à cela ne tienne. Une chose est certaine, sur la voie de la candidature unique à la présidentielle, aucun camp ne peut se dire d’avance rassuré et certain de son fait. Dans l’opposition, rien ne garantit encore que les différents candidats puissent taire leurs égos et mettre la lumière sur un seul candidat au profit duquel tous devraient se liguer et mobiliser les forces en vue d’obtenir l’alternance. Côté FCC, personne ne peut présager qu’en campagne électorale, tous, même les recrues de la dernière heure, acceptent d’assumer, derrière le candidat commun, le bilan des deux mandats de l’actuel régime. En 2011, l’on a vu des candidats à la députation nationale se garder de distribuer les matériels de propagande de leur candidat président de la République, de peur d’être eux-mêmes sanctionnés par l’électorat. Conséquence, l’on a vu des circonscriptions où un candidat député était élu, alors que son candidat à la présidentielle était rejeté, n’atteignant parfois même pas la moitié des voix engrangées par ledit député.
Quoi qu’il en soit, candidat commun ou unique, dans un camp comme dans l’autre, il y a une variable majeure et déterminante que nul ne maîtrise : les partis ou regroupements politiques ne sont pas les propriétaires des voix des électeurs ; et les consignes de vote n’engagent que ceux qui les donnent.
Mantha L.